Pour faciliter la compréhension de celle ci, j’ai imaginé un dialogue entre une personne méconnaissant la spiritualité que nous appellerons « Beni», et une autre personne plus ou moins informée sur celle-ci nommée «Nsemi»: Action
Dis-moi Nsemi, qu’est-ce que la spiritualité ?
Tout d’abord mon cher Beni, la spiritualité n’est pas un « gros mot ». Ce n’est pas un mot effrayant, abscons ou encore hermétique. Du latin spiritus, esprit, elle désigne le cheminement vers l’esprit, c’est-à-dire le divin qui réside en nous.
Le divin qui réside en nous ? Que veux-tu dire par là?
Dans la partie précédente concernant les religions africaines, nous avions discuté du Créateur, le démiurge qui organisa l’univers.
Oui, je me souviens. Les anciens égyptiens les nommèrent, en autres noms, Ra.
Effectivement. Et bien selon la théologie héliopolitainne, il existe une Source Universelle précédant l’existence et l’organisation de l’univers : le NOUN. Le Noun désigne la Matière Incréé et éternelle d’où émane toute chose (les Univers, les galaxies, les planètes, les dieux créateurs, les entités spirituelles, les espèces vivantes…). Elle est la matière primordiale, le principe ineffable. Du Noun se manifesta le démiurge Ra, la Conscience Primordiale ; qui une fois vint à l’existant, acheva et organisa l’univers.
Mais lorsque celui-ci conçu toute chose, il ne conçut uniquement les idées, les concepts et non leurs matérialités.
Ah bon ? Alors d’où provient la matérialité de ces idées ?
Très bonne question. La forme provient du Noun. En fait, Ra, le Créateur baigna les idées dans le Noun et celles-ci furent investies d’une matérialité, une matérialité divine. Dès lors, tu dois comprendre que tout ce qui existe dans l’univers est composé d’esprit, une parcelle très infime du Créateur, et de Matière, une quantité infiniment petite du Noun. En ce sens, nous, les hommes, mais également tout ce qui existe sur Terre, sommes faits « DE LA MÊME MATIÈRE QUE LES ÉTOILES ».
C’est donc pour cela que la Physique quantique affirme qu’au niveau subatomique, les galaxies, planètes, les étoiles, les êtres vivants et la Nature sont liés, car issus d’une même Source. Mais comment se déroule cette création ?
Oui nous sommes liés, en un mot nous sommes « Un ». En ce qui concerne le processus de Création opéré par le Créateur, elle est comparable à une EQUATION. Une équation aux solutions infinies, car les variables et les composantes sont de même, infinies. Cette équation, nous pouvons la nommer « ÉQUATION DE LUMIÈRE » car à l’image de l’Homme qui ne peut fixer le soleil à l’œil nu, il ne peut non plus fixer, avec son entendement, la composition de cette Équation.
Donc, si je comprends bien, la composition chimique et biologique de la Terre, les hommes, les animaux et la nature étaient non seulement en germe dans ce Noun, mais ils sont également une solution possible de cette équation divine.
Exactement, une équation parmi tant d’autres. Et, puisque nous sommes liés, les humains doivent respecter tout ce qui existe sur la Terre. C’est pourquoi les religions, qualifiées improprement d’animistes exhortent à l’être humain de maintenir un équilibre avec la Nature et respecter celle-ci, étant également crée par Nzambi A Pungu.
Mais dis-moi, s’il faut respecter la Nature pour son aspect divin, ne faut-il pas en faire de même pour l’être humain ?
Parfaitement. L’être humain, au même titre que toutes les créatures, possède en son sein une parcelle du Créateur, et de ce fait, il est sacré.
Donc, dans une certaine mesure, puisque les hommes sont une particule du Divin, je peux dire que nous sommes des dieux ?
Tout à fait.
Aussi, la spiritualité serait en fait reconnaître que nous sommes des êtres divins, mais que la nature et les animaux également sont divins. C’est bien cela ?
D’une certaine façon, oui. Mais par cette notion, il faut comprendre également le cheminement vers cette divinité qui réside en nous.
Cheminer vers l’intérieur… Donc désormais, je ne dois plus chercher le Divin à l’extérieur mais l’intérieur de moi alors que dans ma religion, il est enseigné le contraire. Si le Divin est en nous, cela voudrait donc dire que les religions nous mentent quand elles affirment que Dieu siège au ciel ?
La réponse t’appartient. Tu as désormais en ta possession non pas une seule mais deux vérités. Si le Divin est en toi, alors il te suffit de lui poser sincèrement la question, et il te répondra.
D’accord. Et qu’est-ce qui distingue réellement la religion à la spiritualité ?
La religion désigne un ensemble des croyances, des pratiques, qui régissent le rapport des hommes avec le divin. Elle est créée par les hommes, en ce sens elle est subjective. De plus, elle dépend des facteurs particuliers tels que la tradition, la culture, les coutumes.
Il y’ a des religions qui tolèrent l’esclavage tandis que d’autres le condamnent. Certaines croient à l’existence de l’enfer et du paradis alors que d’autre n’y croient pas. L’ensemble de ces croyances sont dogmatiques, c’est-à-dire qu’il est proscrit non seulement de les remettre en question et surtout il est demandé au fidèle d’y croire.
Juste d’y croire, sans même réfléchir ?
Oui, juste de croire. Le religieux se doit de croire aux dogmes et non essayer de les comprendre, et encore moins de les remettre en cause. Tout au long de l’Histoire, des femmes et des hommes furent tués parce qu’ils osèrent se détourner des dogmes.
C’est également pour cette raison que l’Histoire de l’humanité est marquée par les guerres de religions. D’ailleurs, je me suis toujours demandé comment des hommes qui prient un Dieu, supposé être Amour inconditionnel, peuvent massacrer d’autres hommes qui sont les créatures de ce même Dieu. C’est paradoxal.
Et qu’en est-il de l’être spirituel, n’est-il pas dogmatique ?
Un homme spirituel n’imposera jamais sa vérité à un autre car il sait, en son for intérieur, que la relation avec le Divin relève de l’intime et qu’elle ne nécessite aucun dogme ; mais surtout que les croyances sont contingentes ; et enfin que l’esprit qui réside en autrui, bien qu’il adhère à une religion, est sacré. Aussi, contrairement à l’homme religieux, pour qui la sœur ou le frère est d’abord celui qui pratique la même religion, l’homme spirituel voit en tout être humain une sœur ou un frère. Il ne voit pas un Noir, un Blanc, un Jaune ou un Rouge ou encore un musulman, un chrétien, ou un bouddhiste, mais avant tout l’expression du Créateur.
Dès lors, quand les athées affirment ne pas croire au divin, inconsciemment, ils font référence aux dieux des religions, siégeant au ciel et non au Créateur ?
Certes, ils font l’amalgame.
En définitive, la spiritualité serait d’une part, la reconnaissance de la nature divine en toute chose, et d’autre part le processus par lequel j’accède à ma divinité.
Parfaitement. Et l’Homme de demain, sera un être spirituel car il prendra conscience que « Tout est Un » et qu’en lui, mais également en autrui et en la Nature, vibrent le Divin.
Ainsi, lorsque ce système s’effondrera, et que nous serons libérés des croyances dogmatiques, l’être humain retrouvera sa véritable identité: le Muntu.
Conclusion
Le Muntu est la dénomination en kikongo (une des langues dite bantu de la République Démocratique du Congo), pour désigner l’être humain : non pas celui imbus de lui-même ou bien ivre d’Ego, mais l’Homme véritable, celui qui sait reconnaitre le « Un » en toute chose. La reconnaissance de cette absolue vérité développe en celui-ci une compassion mais surtout et avant tout un amour inconditionnel pour son prochain. En un mot, le Muntu désigne l’être humain qui a pris conscience de son affiliation avec le Divin.
Dans son ouvrage LONGO, la danse africaine d’ancrage, Elima nous apprend ceci au sujet du Muntu :
« Dans MUNTU nous avons MU qui veut dire l’origine, et NTU, qui veut dire la tête. MUNTU, dont le pluriel est BANTU, voudraient donc dire : qui vient de Celui qui est la cause, la Source de tout. C’est notre affiliation avec Celui Qui Est. Cette filiation requiert, de notre part, la reconnaissance de notre vraie identité. Ce processus de la reconnaissance est ce qu’on appelle le KIMUNTU ».
Na Bolingo mpe na Kimia ( en Amour et en Paix )
Par Beni Nsemi
Features
Release Date | 2010-09-01T00:00:00.000Z |
Language | Français |
Number Of Pages | 158 |
Publication Date | 2010-09-01T00:00:00.000Z |
Format | Ebook Kindle |