Le peuple Somali représente 85% des habitants du pays qui porte le même nom. Les Oromo quant à eux sont également un peuple de la corne de Kamita (l’Afrique), représentant plus d’un tiers de la population éthiopienne. Hailé Selassié, le dernier empereur d’Ethiopie et acteur majeur de la tentative d’union africaine, était un Oromo. Ces deux peuples appartiennent au grand peuple Koushite, d’où le fait de consacrer un article commun à leur spiritualité. Si les Oromo sont connus pour la pratique du christianisme orthodoxe notamment à travers les grands empereurs d’Ethiopie, et si la Somalie est aujourd’hui totalement musulmane, ces peuples ont pourtant une spiritualité traditionnelle qui présente d’incroyables similitudes avec celles de tous les peuples d’Afrique noire.
1) Un seul Dieu
Pour les Koushites, il existe un seul Dieu, dont le nom est Waaq ou Waaqa, encore appelé Eebe par les Somali. D’après les Oromo, Waaqa s’est créé tout seul, tout comme Amon/Imana s’est créé tout seul en Egypte antique. On parle d’Incréé. Waaqa est source et amour de Dhuughaa, c’est à dire la vérité, et il n’aime pas l’injustice et le crime. Dhuughaa ici est de toute évidence la Maât (vérité et justice) de l’Egypte antique, encore appelé Mbongi chez les baKongo et Mbok chez les Wolof du Sénégal.
2) L’ancêtre primordial à divers attributs
Waaqa est sous la forme de différents attributs appelés Ayaanle chez les Somali, Ayyanya chez les Oromo, Vodoun chez les Fon, Orisha chez les Yoruba, Loa chez les haïtiens. En réalité pour les Kamites (noirs), l’ancêtre primordial/Dieu est semblable à un diamant à multiples facettes, il prend des noms et des aspects différents selon qu’il s’occupe de tel ou tel domaine de la vie. Quand il représente la fertilité, il est Aïssata (Isis) en Egypte antique, Aïssitu ou Aïssata également pour les Koushites, et Asaase pour les Akan du Ghana et de Côte d’Ivoire. Il est également à noter que Horo (Horus) chez les égyptiens anciens est un attribut représentant le pouvoir de Dieu, et dont l’animal totémique est un faucon. Horo est également chargé d’introduire le mort dans la salle du jugement dernier. Chez les Somali, Huur est un ayaanle considéré comme le messager de la mort et qui se manifeste par un grand oiseau. Huur est donc Horus ici. De la même façon, pour les Fang d’Afrique centrale, une chouette venant crier en soirée près d’un domicile est annonciatrice d’un décès. D’après le chercheur somali Mohamed Diriye Abdullahi, il faut également voir en le père Awzaar de la cosmogonie somali l’équivalent d’Ousiré (Osiris) qui prend la figure du père chez les égyptiens. Le nom d’Ousiré chez les Akan est Osoro. On retrouve donc la famille sainte kamite au complet chez les égyptiens anciens et chez les Somali.
Les Oromo considèrent la terre comme un attribut de l’Ancêtre primordial, la terre serait pour eux la femme du ciel. En réalité le ciel comme la terre sont également des Ayyanya. En Egypte antique, Nouté (le ciel) et Geb (la terre) forment aussi un couple. A l’inverse chez les égyptiens, le ciel était une femme et la terre un homme. C’est le ciel par la pluie et le soleil qui féconde la terre pour que la végétation qui nourrit pousse, ce faisant il s’agit donc d’un couple. Avant la conquête du pays Oromo par les rois chrétiens orthodoxes, la terre n’appartenait à personne, tout comme dans les anciens empires ouest africains. La propriété foncière n’existe pas dans l’Afrique traditionnelle, tout le monde peut cultiver la terre. On ne saurait posséder un attribut de l’Ancêtre primordial.
3) Les ancêtres morts sont divinisés
Les Koushites honorent également les ancêtres. Pour les Kamites, Dieu est cette énergie indestructible à l’origine de la création du monde. Toute chose vivante l’est grâce à l’énergie donnée au commencement par l’Ancêtre primordial. L’homme vit grâce à cette énergie divine par laquelle il est animé. Quand on meurt donc pour les Oromo comme pour les égyptiens anciens, il y a séparation entre le corps matériel et l’énergie. Ce faisant l’ancêtre mort ne disparaît jamais. Cette énergie rejoint Waaqa, tout comme pour les égyptiens anciens, on parlait lors de la mort d’émergence dans la lumière divine. Cette fusion de l’énergie du mort avec l’énergie divine est pleinement réalisable à midi lorsque le soleil, manifestation principale de Dieu, est à son zénith. Le soleil à son zénith en Egypte antique était appelé Ra/Rè. C’est pourquoi Nelson Mandela qui était un Xhosa d’Afrique du sud et initié à la spiritualité africaine, a subit le rite de l’ascension à midi exacte. Les ancêtres de la même façon sont appelés Razana par les Malgaches.
4) L’égalité entre la femme et l’homme
Pour les Oromo, un homme comme une femme peuvent être prêtres traditionnels. On parle du Qaallu. La spiritualité africaine contrairement aux religions dites révélés n’interdit pas à la femme d’exercer, c’est pourquoi il y a des Mambo (prêtresses) dans le Vodou, des prêtresses chez les Zulu, et qu’il y avait des grandes prêtresses en Egypte et dans la république noire de Carthage. Les ayaanle s’expriment en prenant possession d’un Qaallu tout comme les attributs s’expriment également en prenant possession du Mphimazi (prêtre) chez les Malgaches.
5) Autres similitudes avec le reste de l’Afrique noire
Une autre caractéristique de Waaqa est qu’il est Qulqulluu, c’est à dire pure. C’est probablement là l’origine du nom de Dieu chez les Zulu d’Afrique du sud, à savoir Unkulunkulu. Egalement chez les peuples du Cameroun, en cas de désespoir on s’exclame «Wèèkè», «Wooko», «Waaka». On peut penser que quand on est désespéré au Cameroun, on remonte en fait à ses origines égypto-nubiennes pour faire appel à Dieu dans son appellation koushite.
6) Quels implications pour l’Afrique noire ?
Quand on sait que les Zulu comme les Xhosa comme les peuples du Cameroun (Bassa, Bamilékés, Fang, Bamoun, Peul etc) sont d’origine égypto-nubienne, on comprend les impressionnantes similitudes entre eux et les Koushites. Koush est le nom de la Nubie (sud Egypte actuelle / Soudan) dans les textes pharaoniques. l’Ethiopie quant à elle était une province de Koush. On peut donc penser que soit les Koushites sont d’origine égypto-nubienne, soit ce sont des peuples qui étaient là de tout temps, vivant en périphérie de la vallée du Nil. Quoi qu’il en soit cette communauté de culture et d’ancêtres entre l’Ethiopie – tout du moins en partie – la Somalie, les autres peuples noirs d’Afrique et Madagascar rend tout à fait légitime et naturel l’incorporation de tous ces pays dans un futur état fédéral d’Afrique noire.
http://africanhistory-histoireafricaine.com/
SOURCES:
– Traditionnal Oromo attitude towards the environnement, Workinneh Kelbessa, pages 22 à 27
– Culture and Customs of Somalia, Mohammed Diriye Abdullahi
– Lettre publique de Mohammed Diriye Abdullahi, Michigan State University