Il y a quelques années, en tant qu’anthropologue, je me suis intéressé à l’art-thérapie en côtoyant Grobli Zirignon, psychanalyste, philosophe et inventeur de la psychart-thérapie, une approche qui propose un lien épistémologique entre la psychanalyse et l’art-thérapie. Pour Grobli Zirignon, la psychart-thérapie c’est “l’art-thérapie conçue comme extension et approfondissement du champ psychanalytique”. C’est véritablement une voie totalement nouvelle et originale par rapport à l’art-thérapie classique. Par deux de ses concepts, au moins, l’initiation et la médiation du “Verbe”, par exemple, la psychart-thérapie interpelle indéniablement la socio-anthropologie. Pour Grobli Zirignon, “l’initiation doit permettre à l’humain la maitrise symbolique de ses pulsions”, car “celui qui n’a pas la maîtrise symbolique de ses pulsions sadiques est contraint de les projeter sur une autre personne pour se préserver de leur destructivité”. Donc l’humain, par l’initiation, doit cesser d’être un être de pulsions afin de se débarrasser de comportements de prédation et construire un monde de civilisation.
De même, pour Grobli Zirignon, l’homme sage doit être « possédé » ou « habité » par le “Verbe” comme ce fut le cas aux origines de l’évolution, afin de limiter son action autodestructrice. Le “Verbe” intériorisé, dit-il, doit transformer l’être de pulsions non structuré en un être de langage. Ces deux notions structurantes pour l’humain doivent le conduire à la prise de conscience et à l’acceptation de sa propre finitude. Elles sont aussi – et c’est là qu’elles intéressent l’anthropologie évolutionnaire ou évolutionniste – deux marqueurs du passage du primate non-humain (naturellement prisonnier de ses pulsions) au primate humain (qui doit tendre à la maîtrise de ses pulsions de destruction). Même si des études ont montré qu’il y aurait également des singes artistes (par exemple le chimpanzé Congo dont les œuvres sur toiles furent jadis étudiées par Desmond Morris), la psychart-thérapie vient montrer le caractère plus culturel de l’art créé par Homo sapiens et qui serait une des signatures du propre de l’humain tant recherché par la paléoanthropologie.
La psychart-thérapie, s’adresse à tout le monde. Un sujet peut vouloir s’engager dans cette pratique pour gérer ses pulsions avant qu’elles n’échappent à sa maîtrise. Chez les sujets présentant des pulsions qui deviennent dommageables pour leur propre santé (auto-agressions et agressions d’autrui), elle peut être d’un grand recourt. La psycho-généalogie nous apprend que les contemporains peuvent souffrir de traumatismes subis par leurs ascendants ou leurs ancêtres (cas de l’esclavage, de la colonisation, des guerres, des migrations forcées des grands-parents ou des parents, occupations de terres revendiquées ou confisquées par d’autres, etc.). Les conflits contemporains, dont certains sont souvent d’une rare violence, sont également pourvoyeurs de pulsions mortifères chez ceux qui les subissent comme chez ceux qui les engendrent. Dans tous ces cas, la psychart-thérapie prend tout son intérêt en permettant d’évacuer ces pulsions nocives sur un support artistique (grattage du carton ou cassage de pierre, par exemple) que Grobli Zirignon appelle le “champ de la métaphore. Une pratique qui doit être encadrée par le psychartthérapeute sur un premier temps suffisamment long, avant d’être poursuivi de manière autonome.
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