Un esclave affranchi n’est pas encore un homme libre. Il n’est qu’un esclave affranchi par un maître généreux ou calculateur. Ce qui différencie l’affranchi de l’homme libre c’est que l’affranchi n’est pas convaincu de sa liberté qui est octroyée, et qu’il continue de se comporter comme un esclave. En effet, l’affranchi se trahit toujours par quelques signes. Il en est ainsi parce que, libéré des chaines de la servitude sociale, l’affranchi n’en demeure pas moins esclave par sa mentalité. On est asservi à la faveur d’un malheureux accident de l’Histoire et on devient «esclave» par la force du déterminisme psychologique.
Par quelles voies mystérieuses ?
Parce que le processus de réduction en esclavage ne s’accomplit que lorsque l’esclave a opéré l’intériorisation du maître. c’est en le laissant briser sa capacité de résister et de garder sa faculté d’assentiment que l’esclave laisse le maître pénétrer sa personnalité et prendre possession de son espace intérieur. L’esclave accompli perd le contrôle de sa vie intérieure au profit du maître. C’est ainsi que l’esclave devient la chose du maître invisible: le pantin qu’il continue à manipuler hors scène.
L’esclavage mène donc à l’aliénation c’est-à-dire au devenir-autre. Cela signifie que la fin de l’esclavage c’est de reproduire le maître ad vitam aeternam. C’est pourquoi l’esclavage bien mené aboutit à une sorte de libération de l’esclave de ses chaines devenues inutiles. Ainsi l’affranchissement signe-t-il la mort de la personnalité de l’esclave et l’apothéose du maître.
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